A la recherche d’une preuve
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  La présence des Romains chez les Lingons est établie ainsi que l’intérêt pour eux de se tenir dans l’est de ce territoire pour rester proches du nœud routier de Chalindrey et y attendre les renforts germains à l’écart des tribus révoltées.

  Cette retraite se fait en direction de la « Province » en empruntant une direction sud-est (le Jura-Genève), la plus courte et la seule possible : l’hostilité des Gaulois, la longueur des autres trajets ou la présence des Helvètes ne laissent ouvert que le passage qui aboutit à l’oppidum de Chaux.

  La retraite au sud-est indiquée par César l’éloigne d’Alise-Sainte-Reine ; celle-ci est à l’ouest de la route (fermée) vers le centre de la Narbonnaise et à l’opposé de celle de Genève. Au contraire, cette retraite au sud-est fait comprendre que la bataille de cavalerie n’ait pu se dérouler qu’en un point du Jura ou proche de lui.

  Le plan stratégique de Vercingétorix n’a rien à voir avec l’équipée aventureuse qui l’aurait fait courir se réfugier par hasard à Alise-Sainte-Reine, sur la première petite colline venue, faiblement fortifiée par la nature, au bord d’une vaste plaine ouverte à toutes les armées en marche et située vers le centre de la Gaule.

  La réalité stratégique est le contraire de cette lamentable équipée : au moment de la bataille de cavalerie César est proche de la sortie de la Gaule ; il progresse vers Genève pour, dit-il, « secourir les Allobroges » dont c’est la capitale ; il butte alors sur un oppidum imprenable tenu par les Gaulois qui l’y attendent ; il s’y trouve bloqué tandis qu’une armée gauloise de renfort le prendra en tenaille.

Cette stratégie cohérente ne laisse aucune place à un détour improvisé vers Alise-Sainte-Reine. 

  En conclusion, les intentions et les actions des deux belligérants orientent vers la frontière est de la Gaule la recherche du site de la bataille de cavalerie préalable au siège. Les textes des historiens contredisent-ils cette première indication ?

 

 

















    Position de l’armée romaine lors de la bataille de cavalerie : dans le Jura (in Séquanos)




 




 














  




  Dion Cassius donne cette indication sur la bataille de cavalerie : « Vercingétorix surprit César chez les Séquane (le Jura). » Une erreur de traduction est impossible tant ces trois mots sont clairs et les ressources de l’à-peu-près grammatical inexistantes.






 
 



L’armée romaine en retraite

  L’affaire paraît simple. Cette bataille mit aux prises des milliers de cavaliers tournoyant autour des colonnes en marche de dizaines de milliers de fantassins romains. Il fallut donc de la place, beaucoup de place, des centaines d’hectares, et relativement plate pour les chevaux, donc une plaine étendue. Cette plaine il faut la trouver soit près d’Alise-Sainte-Reine soit près de l’Alésia du Jura.

  Les données stratégiques et les textes mettent César dans le Jura mais n’indiquent pas où se trouve exactement le lieu même de la bataille de cavalerie. Cependant, les descriptions de la bataille qui nous sont parvenues contiennent des informations qui permettent de se faire une idée de la nature du lieu. Autorisent-elles des rapprochements avec des sites précis ?





  Des deux récits de la bataille de cavalerie qui nous sont parvenus, ceux de César et de Plutarque, c’est le premier qui donne le plus d’indications pratiques.

  « Le lendemain, les cavaliers [gaulois] sont répartis en trois corps et deux apparaissent soudain sur nos flancs tandis que le troisième, en tête de la colonne, s’apprête à lui barrer la route. Quand César apprend la chose, il ordonne que sa cavalerie également partagée en trois courre à l’ennemi.

  La colonne fait halte ; on rassemble les bagages au milieu des légions. On se bat partout à la fois. S’il voyait nos cavaliers en difficulté ou en dangereuse posture sur quelque point, César faisait faire front et attaquer de ce côté-là ; cette intervention retardait la poursuite des ennemis et rendait courage aux nôtres qui se sentaient soutenus. Enfin les Germains, sur la droite, avisant une hauteur qui dominait le pays, bousculent les ennemis qui s’y trouvaient ; ils les poursuivent jusqu’à la rivière où Vercingétorix avait pris position avec son infanterie et en font un grand carnage. Voyant cela, les autres craignent d’être enveloppés et se mettent à fuir. Partout on les massacre…

  Après cette déroute de toute sa cavalerie, Vercingétorix, qui avait disposé ses troupes en avant de son camp, les mit en retraite incontinent, et prit la route d’Alésia… ».


  Que peut-on déduire de l’analyse de ce texte ?

 
  Nous savons déjà que l'emplacement de ce combat est situé au maximum à 20  kilomètres de l’Alésia antique ; obligatoirement sur une voie de circulation par où puisse s’écouler les charrois d’une armée ; qu’il est très vaste, plusieurs km² ; et que c’est une surface plane et dégagée.

  Il présente en outre sur la droite de la colonne romaine deux éléments décisifs : une hauteur d’où les Germains délogent les Gaulois et une rivière assez importante pour que d’une part les Gaulois poursuivis ne puissent échapper aux cavaliers germains et d’autre part pour que ces mêmes Germains ou des Romains n’aillent pas s’en prendre à l’infanterie de Vercingétorix qui est derrière cette rivière.

  Enfin il offre à l’infanterie gauloise, derrière la rivière, une place considérable qui puisse la recevoir et permettre un repli direct sur l’Alésia antique.
  Ces différentes caractéristiques se retrouvent-elles à proximité d'Alise-Sainte-Reine ou de l'Alésia du Jura ?

I – LA DESCRIPTION DU LIEU DE LA BATAILLE DE CAVALERIE PAR LES HISTORIENS

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  César écrit que dès le lendemain (altero die) de l’embuscade, il atteint l'Alésia antique. Il dispose donc d’une seule journée pour atteindre l'Alésia antique. De plus, il n’a pas pu parcourir la trentaine de kilomètres d’une étape standard (justum iter en latin) mais seulement une vingtaine au grand maximum. Il faut traduire ou plutôt tricher comme Napoléon III pour prétendre le contraire. L’Alésia antique doit donc se trouver très près du site de cette bataille de cavalerie, sans doute à une quinzaine de kilomètres.

  César donne ensuite la direction qu’il prend, le territoire des Séquanes, tribu gauloise occupant le Jura. La forme grammaticale qu’il utilise précise qu’il y pénètre effectivement. Affaire réglée donc, l'Alésia antique était dans le Jura. Pas du tout, disent les partisans d’Alise-Sainte-Reine, César dit qu’il va « vers » le Jura mais il n’y est pas entré, il a changé de direction à un moment donné et s’est retrouvé en Bourgogne à Alise-Sainte-Reine.

  Sans entrer dans le détail (voir pour cela le site indiqué plus haut), retenons pourquoi la traduction par « vers » est erronée. Aucune grammaire latine ne permet « vers » et si une seule l’avait fait, soyons certains que cela aurait été proclamé depuis longtemps par les partisans d’Alise-Sainte-Reine.

  Pour Plutarque, César « alla au-delà du pays qui le séparait du territoire des Séquanes (le Jura) ». Le sens est clair, César atteignit le Jura. Les partisans d’Alise-Sainte-Reine y voient au contraire la preuve (?) que César n’y est pas allé.

Plutarque

 La seule solution que trouve Michel Reddé pour se débarrasser de ce témoignage est de dire qu’il ne vaut rien parce qu’il apparaît 250 ans après les faits. Et dans ces conditions, que vaut celui de Michel Reddé qui en parle plus de 2 000 ans après ?

  D'autant plus qu'à l'époque Dion Cassius avait à sa disposition l'immense bibliothèque romaine, alors que Michel Reddé ne peut en parcourir qu'un infime reliquat.

  C’est nier la notion même d’Histoire quand on veut en être l’interprète inspiré.

Dion Cassius In Sequanos Altero Die

Alise Sainte-Reine aux coquelicots

Redoutable forteresse ?

Crédit photo: Tolbiac 204

Justum Iter

Deuxième partie
Les textes et la localisation de la bataille de cavalerie,
toute proche de l'Alésia antique

Troisième partie
 les données topographiques et militaires

  Concluons avec plus de logique : ces données ont été établies à trois époques distinctes ; elles ont été rédigées dans deux langues différentes ; elles proviennent de trois personnalités sans liens directs, un homme politique de premier plan, un historien moraliste et un haut fonctionnaire impérial. Cette extrême diversité d’origine aboutit au même témoignage : peut-on mieux établir un fait historique ?  Les textes imposent que la bataille de cavalerie et le siège de l’Alésia antique se soient déroulés dans le Jura.

  Reste à le prouver sur le terrain.

  Que dit la réalité topographique d’Alise-Sainte-Reine et de l’Alésia du Jura ?  Laquelle pourrait présenter une lieu adapté à la bataille de cavalerie qui lui soit proche ?

  Le dictionnaire latin Gaffiot (la référence) écrit en toutes lettres que « vers » est impossible dans ce cas. Il fait mieux encore en précisant que les Mandubiens (c’est le nom des habitants de l'Alésia antique) vivaient en Franche-Comté. Jérôme Carcopino, le maître latiniste et historien du XXème siècle tient pour indubitable que César soit allé chez les Séquanes, même s’il en tire des conclusions aventureuses.

  Il est vrai enfin qu’il existe un cas où la tournure utilisée par César se traduit par « vers » mais c’est une exception bien connue (voir ci-contre Traduire in sequanos comme Napoléon III) qui exige des conditions particulières qui sont absentes ici.

  Il ressort du texte de César que la veille du début du siège il passait chez les Séquanes dont le territoire comprend  le Jura. Il est à 150 km d’Alise-Sainte où il devrait être le lendemain (« altero die ») pour commencer le siège. C’est évidemment impossible. Et ce n’est pas tout, deux autres historiens disent la même chose.

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  Pour l’analyse détaillée des deux passages de « la Guerre des Gaules » qui localisent l'Alésia antique dans le Jura se reporter sur au chapitre « Le latin, l’Alésia antique et le Jura ».